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Publié : 14 septembre 2011
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Le 11 septembre 2001 et la rumeur

Une décennie après les attentats de 2001, une très large partie de la population continue de croire à la théorie du complot… malgré la faiblesse des arguments avancés.

http://eyael.centerblog.net/rub-11-septembre-2001-.html

Face à un événement traumatisant, le besoin de trouver une explication devient parfois si fort que la raison en fait les frais. Ainsi pour ces trois célèbres théories du complot :
- 1969, « La rumeur d’Orléans ». Des jeunes femmes parties faire du shopping disparaissent dans les cabines d’essayage des magasins juifs de vêtements d’Orléans et rejoindraient ensuite un réseau de prostitution.
- 1970, « On n’a pas marché sur la Lune ». Les images des missions lunaires Apollo diffusées par la Nasa sont des trucages.
- 1990, « L’armée américaine a créé le sida », pour réduire les populations homosexuelles ou noires américaines et africaines.

La rumeur : « La démolition des tours a été soigneusement planifiée »

Argument 1 : « La chute est trop parfaite »

Pourquoi les bâtiments se sont-ils effondrés « proprement » sur leur base, chaque étage s’écroulant sur l’étage inférieur à une vitesse proche de celle de la chute libre ? Pour certains, c’est le signe que la chute a été provoquée artificiellement par des explosifs, comme dans une démolition contrôlée.

Analyse de Science & Vie : Le phénomène s’explique par la rupture initiale des étages directement touchés par le crash : l’énergie cinétique considérable acquise dans ce début de chute par l’ensemble des étages situés au-dessus (15 pour la tour Nord, 30 environ pour la tour Sud) dépasse la capacité d’absorption des étages inférieurs [1]. Or, à chaque étage démoli, la masse et la vitesse des étages en chute (et donc l’énergie cinétique) augmentent, ce qui rend encore plus rapide la rupture des étages inférieurs. […]

Argument 2 : « On a entendu des bruits d’explosion »

Différents témoignages font état de mystérieuses explosions entendues dans les tours par les personnes présentes lors du drame. Le concierge de la tour 1, William Rodriguez, a même affirmé en avoir entendu avant le crash. S’agirait-il des fameux explosifs utilisés pour la démolition contrôlée ?

Analyse de S&V : De là où se trouvait le concierge, au sous-sol, il est difficile de distinguer le crash lui-même des explosions qui suivirent. Et aucune caméra n’a enregistré le bruit caractéristique des explosifs utilisés en démolition contrôlée. Surtout, explosion ne veut pas nécessairement dire présence d’explosifs. Ainsi, dans les incendies de grande ampleur, les explosions sont courantes : les gaz combustibles accumulés dans une pièce s’enflamment brutalement, produisant une détonation. Le phénomène est bien connu des pompiers. […] D’autre part, les avions contenaient chacun près de 30 000 litres de kérosène : 15 % se sont consumés dans la boule de feu créée par le crash et 15 % supplémentaires ont brûlé immédiatement à l’intérieur de la tour. Le reste, soit environ 70 %, ne s’est pas consumé tout de suite, faute d’une quantité suffisante d’oxygène [2]. […]

Argument 3 : « De mystérieux squibs [3] sont apparus »

Les vidéos de l’événement révèlent, au moment de la chute des tours, des jets de matière localisés sur les façades et en avance sur le front d’effondrement. Les partisans de la thèse de la démolition contrôlée leur ont donné le nom de « squibs » (pétards). Ils y voient l’action d’explosifs.

Analyse de S&V : […] un tel effondrement provoque aussi une surpression qui se propage, vers le bas, à une vitesse supérieure à celle de l’effondrement. Comme dans un piston, la pression, au cours de l’écroulement, augmente brusquement dans les étages encore intacts, en dessous du front d’effondrement [4]. […]

Argument 4 : « L’acier est entré en fusion signe de températures anormalement élevées »

Des écoulements de métal en fusion ont été observés lors des incendies en façade de la tour Sud. Or, la température de fusion de l’acier est d’environ 1300 °C (variable en fonction de la composition précise de l’acier), ce qui est très supérieur à la température des incendies.

Analyse de S&V : Les écoulements de métal observés n’étaient pas forcément de l’acier ! Plusieurs métaux ont en effet des températures de fusion très inférieures à celle de l’acier, en particulier l’aluminium. Or, ce composant, utilisé pour sa légèreté et sa résistance, est justement présent en quantité dans les avions. Et il fond à 660 °C, une température très largement atteinte à l’endroit où s’est écoulé ce métal fondu. […]

Argument 5 : « On a trouvé des traces d’explosifs dans les décombres »

La présence de soufre et d’un mélange d’aluminium et d’oxyde ferrique pourrait indiquer que des substances dégageant une forte chaleur (thermite ou thermate) ont été déposées peu de temps avant l’effondrement, afin de provoquer la fonte des structures porteuses en acier. Les auteurs d’un article publié en 2009 dans The Open Chemical Physics Journal [5] affirment même avoir identifié, dans des poussières recueillies sur le site, de la nanothermite, une substance plus puissante encore que la thermite.

Analyse de S&V : La présence de soufre sur certaines poutres n’a rien de mystérieux : c’est un composant du gypse, élément de base du plâtre, qui accélère fortement l’oxydation de l’acier lorsqu’il est sous forme pulvérulente. Justement réduit à l’état de poudre quand les tours se sont effondrées, le plâtre a logiquement pu accélérer la corrosion de l’acier et causer sa sulfuration, en raison des hautes températures générées par les incendies qui ont couvé dans les décombres, selon un processus parfaitement décrit par des spécialistes en métallurgie [6]. […]

Argument 6 : « La taille des débris est étrange »

Dans les décombres, la plupart des poteaux métalliques ont été retrouvés rectilignes et brisés selon des longueurs transportables. Coinddence ? Les partisans d’un complot y voient le résultat de découpes programmées, visant à faciliter le déblaiement.

Analyse de S&V : […] Il paraît plus simple de conclure que si les éléments métalliques présentaient des longueurs transportables, c’est tout simplement parce qu’ils avaient été acheminés et assemblés sous cette forme pour faciliter la construction … plutôt que le déblaiement.

Argument 7 : « Ondes sismiques »

Selon certains, les ondes sismiques enregistrées indiquent un tremblement au niveau des tours jumelles juste avant l’impact des avions, preuve qu’une explosion aurait bien précédé le crash. Ils soulignent aussi que la durée de ces ondes est supérieure à celle, très brève, du crash.

Analyse de S&V : Ces relevés ont été recueillis par le Laboratoire d’observation terrestre à la station PAL (Palisades, Etat de New York), située à 34 km des tours. […] Les relevés correspondent alors bien à la chronologie des événements, aux marges d’incertitude près. La durée des séismes enregistrés (de huit à dix secondes), elle, est le résultat des oscillations successives des tours. L’acier étant très élastique, le crash des avions les a en effet fait vibrer sur leur base.

La rumeur : « L’effondrement de la tour 7 montre les signes d’une démolition contrôlée »

La tour 7 s’est écroulée sans avoir été percutée, à la suite d’un incendie : du jamais vu ! Et c’est d’autant plus étrange qu’elle abritait différents services sensibles, comme la CIA, ou le département de la Défense. Aurait-on eu intérêt à voi disparaître certains documents ?

Analyse de S&V : Située à moins de 120 mètres au nord de la tour 1, la tour 7 a été durement touchée par les débris éjectés lors de son effondrement. L’effondrement des tours jumelles a rompu les canalisations en eau, neutralisant les gicleurs anti-feu. De plus, les protections passives (flocage appliqué sur les poutres et les poteaux), étaient prévues pour résister à trois heures d’incendie. Or, celui-ci a duré sept heures. […] D’autres tours ont souffert. Ainsi, la tour 6, située entre les tours 1 et 7, beaucoup plus petite, a également été détruite. Les étages supérieurs de la tour 5 se sont en partie effondrés. Tandis que la tour 3, qui abritait l’hôtel Marriott, a été partiellement écrasée par les débris de la tour Sud, puis par ceux de la tour Nord.

La rumeur : « Aucun avion ne s’est écrasé sur le Pentagone »

La thèse continue de circuler : le bâtiment militaire aurait été percuté par un missile et non par un avion. Analyse des « indices ».

Argument 1 : « Le point d’impact est bien trop petit »

La collision aurait ouvert une brèche de 5 m de largeur dans le bâtiment, ce qui semble étrangement étroit.

Analyse de S&V : Cette affirmation repose sur une photo de la façade du Pentagone, prise quelques minutes après l’impact, au moment où les pompiers luttent encore contre les incendies. On y aperçoit un trou d’environ 5 m de largeur, mais la fumée et les trombes d’eau déversées masquent l’essentiel des dégâts. Aucune image n’a pu montrer toute l’étendue des dommages. […] L’analyse des dégâts, synthétisée dans un rapport [7] publié en 2003 par la Société américaine des ingénieurs civils, montre que l’avion s’est très vite désintégré en pénétrant dans le bâtiment pour constituer, à l’intérieur, une « avalanche » informe de débris qui a causé des dommages sévères sur une profondeur de 70 m.

Argument 2 : « On n’a jamais vu la moindre vidéo »

Beaucoup s’étonnent que l’avion n’ait pas été filmé avant son crash.

Analyse de S&V : […] Le fait que le FBI ne rende pas publiques les vidéos en sa possession, obtenues par des caméras de sécurité, a nourri la rumeur. Le gouvernement attendait la fin du procès de Zacarias Moussaoui, impliqué dans cet attentat, pour communiquer ces enregistrements. Ce qui fut fait en mai 2006. […] Mais les caméras filmaient avec un taux d’images à la seconde […] trop lent pour saisir un avion se déplaçant à … 240 m/s. Des formes d’explosion et de la fumée blanche sont les seuls éléments discernables. […] Il reste toujours les nombreux témoignages des personnes présentes ce jour-là autour du Pentagone. […]

Argument 3 : « On nous cache la vraie boite noire de l’appareil »

La trajectoire reconstituée à partir de la boite noire est-elle vraiment possible à effectuer ? Si ce n’est pas le cas, la boite noire prétendument retrouvée serait alors une fausse.

Analyse de S&V : Selon le National Transportation Safety Board américain, qui s’appuie sur les données fournies par la boîte noire et par les radars de la sécurité aérienne, l’avion, avant de heurter le Pentagone, a réalisé un demi-tour presque complet en deux minutes, tout en chutant de 5000 pieds. Une manoeuvre irréalisable à 860 km/h, vitesse estimée lors de l’impact. Sauf que la boîte noire indique que l’avion a accéléré à pleine puissance dans les 30 dernières secondes : une fois, donc, la boucle effectuée et la trajectoire maîtrisée. […]

Argument 4 : « Aucun débris d’avion n’a pu être retrouvé »

De nombreuses voix s’étonnent qu’autour des bâtiments du Pentagone, les restes de l’appareil semblent avoir disparu.

Analyse de S&V : C’est tout simplement faux ! Bien au contraire, des centaines d’éléments appartenant au Boeing 757 ont été retrouvés près du point d’impact, dont des morceaux de réacteur, d’un train d’atterrissage, ou encore la jante d’un pneu. […]

La rumeur : « Tout indique qu’un missile ou une bombe est la cause du crash »

Troisième machination suspectée : le vol UA93 n’aurait pas été précipité dans un champ par des terroristes, mais par l’armée de l’air. Crédible ?

Argument 1 : « Il ne reste que de petits débris »

Pourquoi n’a-t-on retrouvé que de petits morceaux de l’avion éparpillés, dont certains à des kilomètres du lieu du crash supposé ?

Analyse de S&V : Comme pour le Pentagone, l’avion a subi un choc à pleine vitesse, entre 800 et 900 km/h, soit plus de 200 m/s. Assez pour qu’il se désintègre, éparpillant ses débris dans un grand rayon, mais pas à des kilomètres du crash. Des morceaux entiers de la carlingue ont été recueillis et ce qu’il restait d’un des réacteurs a été éjecté à « seulement » 300 m du cratère. D’autres éléments, beaucoup plus légers, ont été retrouvés à Indian Lake, à 2,5 km du point d’impact : papiers, métal fin, probablement emportés par le vent.

Argument 2 : « L’armée de l’air aurait pu intervenir »

Pourquoi l’avion n’a-t-il pas été intercepté en vol ? Une question valable aussi pour les trois autres avions.

Analyse de S&V : […] Avec plus de 4000 avions en vol au-dessus des Etats-Unis au moment des piratages, il était difficile de détecter des avions dont le transpondeur (l’équipement qui envoie un signal permettant de suivre sa position) était éteint - ce qui était le cas pour trois des avions détournés. […] Avant d’alerter l’armée de l’air, les contrôleurs doivent donc d’abord chercher l’écho radar primaire de l’avion parmi tous les objets détectés dans le ciel et faire de multiples vérifications. L’armée n’intervient elle-même qu’après avoir reçu différentes autorisations aux plus hauts niveaux du gouvernement. […]

Extraits de Emmanuel MONNIER, Le 11 septembre et la rumeur, Science & Vie, N° 1128, septembre 2011, p. 99, 4,20 €.

Voir Attentats du 11/09 : Mythe et Légendes

Notes

[1] Le J-L et al., « Why the Observed Motion History of World Trade Center Towers is Smooth », Journal of Engineering Mechanics, ASCE, vol. 137, 2011.

[2] Baum H.R., « A simple model of the World Trade Center fireball dynamics », Proceedings of the Combustion Institute, 30, pp 2247-2254, 2005.

[3] Les « squibs » (pétards) sont ces jets de matière observés en façade sur des étages encore intacts, sous le front d’effondrement.

[4] Bazant Z.P., Le J.-L., Greening F.G., Benson D.B., « What did and did not cause collapse of WTC Twin Towers in New York »,Journal of Engineering Mechanics, ASCE, 134, pp.893-906, 2008.

[5] Harrit N. et al., « Active Thermitic Material Discovered in Dust from 9/11 World Trade Center Catastrophe », The Open Chemical Physics Journal, vol. 2, 2009.

[6] Biederman R.R. et al., « Metallographic Examination of Heavily Eroded Structural Steel from World Trade Center Buildings 1, 2 and 7 », Department of Mechanical Engineering, Worcester Polytechnic Institute, 2010.

[7] The Pentagon Building Performance Report, ASCE, 2003.