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Publié : 29 juillet 2007
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Dans quel état sont les écosystèmes ?

Millennium Ecosystems Assessment

Echosystèmes

(…) Un écosystème est un complexe dynamique de composé de plantes, d’animaux, de micro-organismes, et de la nature morte environnante agissant en interaction en tant qu’unité fonctionnelle.

(…) Les services que procurent les écosystèmes sont les bénéfices que les humains tirent des écosystèmes. Ceux-ci comprennent des services de prélèvement tels que la nourriture, l’eau, le bois de construction, et la fibre ; des services de régulation qui affectent le climat, les inondations, la maladie, les déchets, et la qualité de l’eau ; des services culturels qui procurent des bénéfices récréatifs, esthétiques, et spirituels ; et des services d’auto-entretien tels que la formation des sols, la photosynthèse, et le cycle nutritif. L’espèce humaine, quoique protégée des changements environnementaux par la culture et la technologie, est en fin de compte fondamentalement dépendante du flux de services d’origine écosystémique.

L’Évaluation des écosystèmes pour le Millénaire (EM) (Millenium Ecosystems Assessment pour les anglo-saxons) a été réclamée par le Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan en l’An 2000 dans son rapport à l’Assemblée générale de l’ONU, « Nous les peuples : Rôle des Nations Unies au XXIè Siècle »

(…) Elle a été conduite entre 2001 et 2005 pour évaluer les conséquences de l’évolution des écosystème sur le bien-être de l’Homme et pour établir la base scientifique des actions requises pour un renforcement de la conservation des écosystèmes, de leur exploitation de manière durable et leurs contributions au bien-être de l’Homme.

(…) Environ 1360 experts provenant de 95 pays ont été impliqués en tant qu’auteurs des rapports d’évaluation, partie prenante aux évaluations globales aux échelles intermédiaires, ou comme membres du Comité chargé de superviser la revue. (…)

La structure et le fonctionnement des écosystèmes de la planète ont changé plus rapidement dans la deuxième moitié du XXème siècle qu’à tout autre moment de l’histoire de l’humanité :

▪ Il y a eu plus de terres converties en terres agricoles depuis 1945 qu’au cours des XVIIIè et XIXè siècles réunis. Les systèmes agricoles (secteurs dont au moins 30% du paysage est constitué de terres agricoles, de jachères, de production animale sur des superficies restreintes (élevage intensif), ou d’aquaculture en eau douce) couvrent actuellement un quart de la superficie des terres fermes sur l’ensemble du globe.

▪ Environ 20% des récifs de corail dans le monde ont été détruits et une part additionnelle de 20% dégradée au cours des dernières décennies du XXè Siècle, et à peu près 35% des superficies de mangrove ont disparu au cours de cette période (dans les pays où des données suffisantes existent, ce qui couvre environ la moitié des superficies de mangrove).

▪ La quantité de l’eau piégée derrière des digues de barrages a quadruplé depuis 1960, et il y a trois à six fois plus d’eau dans ces réservoirs que dans les cours d’eau naturels. Les quantitatifs de prises d’eau dans les fleuves et les lacs ont doublé depuis 1960 ; la plus grande partie de l’eau utilisée (70% sur l’ensemble du globe) est destinée à des besoins agricoles.

▪ Depuis 1960, les écoulements d’azote réactif (disponible biologiquement) dans les écosystèmes terrestres ont doublé, et les flux de phosphore ont triplé. Plus de la moitié de tout l’engrais d’azote de synthèse - fabriqué pour la première fois en 1913 - jamais utilisé sur l’ensemble de la planète, l’a été depuis seulement 1985.

▪ Depuis 1750, la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère a augmenté d’environ 32% (d’environ 280 à 376 parties par million en 2003), principalement à cause de la combustion de matériaux d’énergie fossile et de changements dans le mode d’utilisation des terres. Environ 60% de cette augmentation (60 parties par million) est intervenue depuis 1959.

L’Homme est en train de changer radicalement, et jusqu’ à un certain degré, de manière irréversible la diversité biologique sur la planète, et la plupart de ces changements constituent une perte de biodiversité :

▪ Plus des deux tiers de la superficie de 2 des 14 principaux biomes [1] terrestres et plus de la moitié des superficies couvertes par quatre autres biomes étaient déjà converties en 1990 principalement en terres agricoles.

▪ Sur une gamme de groupes taxonomiques [2], soit la taille de la population, soit sa gamme, ou les deux, de la plupart des espèces, est en déclin à l’heure actuelle.

▪ La distribution des espèces sur le globe devient plus homogène ; en d’autres termes, l’ensemble des espèces dans n’importe quelle région du monde devient plus semblable à ceux d’autres régions, principalement en raison de l’introduction d’espèces qu’elle soit voulue ou accidentelle, en rapport avec les voyages et expéditions accrus.

▪ Le nombre d’espèces sur la planète est en déclin. Au cours des quelques siècles écoulés récemment, l’Homme a provoqué une augmentation du taux d’extinction des espèces par un facteur de 1000 fois les taux typiques relatifs au contexte tout au long de l’histoire de la planète (certitude moyenne) [3]. Quelques 10 à 30% des espèces de mammifères, oiseaux, et d’amphibie sont actuellement menacées d’extinction (certitude moyenne à élevée) [3]. En général les habitats d’eau douce ont tendance à abriter la proportion la plus élevée d’espèces menacées d’extinction.

▪ La diversité génétique a connu un déclin sur le plan mondial, en particulier au sein des espèces cultivées.

La plupart des changements enregistrés au niveau des écosystèmes l’ont été en vue de faire face à une croissance dramatique de la demande en nourriture, eau, bois de construction, fibre, et en énergie :

(…) Pour satisfaire cette demande, la production de nourriture s’est accrue d’environ deux fois et demi, l’usage de l’eau a doublé, la coupe de bois pour la production de pâte à papier et de papier a triplé, la capacité d’hydro-électricité installée a doublé, et la production du bois de construction a augmenté de plus de la moitié. (…)

- Les changements enregistrés au niveau des écosystèmes ont contribué à des gains nets substantiels sur le niveau du bien-être de l’Homme et le développement économique, mais ces gains ont été acquis de manière croissante au prix d’une dégradation de nombreux services d’origine écosystémique, de risques accrus de manifestation de changements non-linéaires, et de l’accentuation de la pauvreté pour certaines catégories de personnes. Ces problèmes, à moins d’y trouver une solution, auront pour effet de diminuer de manière substantielle les avantages que les générations futures pourraient tirer des écosystèmes.

(…) Les services d’origine écosystémique qui ont été dégradés au cours des 50 dernières années incluent la pêche, l’approvisionnement en eau, le traitement des ordures et la désintoxication, la purification d’eau, la protection contre les risques de catastrophe naturelle, la régulation de la qualité de l’air, du climat régional et local, de l’érosion, la plénitude spirituelle, et le plaisir de l’esthétique.

(…) Au moins un quart des importants stocks commerciaux de poisson sont surexploités (certitude élevée) [3]. De 5% à probablement 25% de l’utilisation de l’eau douce au niveau mondial excède les capacités d’approvisionnement accessibles à long terme.

(…) Quelques 15 à 35% des prélèvements d’eau pour l’irrigation excèdent les taux d’approvisionnement et de ce fait ne peuvent s’inscrire dans la durabilité.

(…) souvent on assiste à une plus grande dégradation des services d’origine écosystémique que ne l’aurait voulu l’intérêt de la société, parce que beaucoup parmi les services dégradés sont des « biens publics. » Bien que les hommes tirent bénéfice des services d’origine écosystémique tels que la régulation de la qualité de l’air et de l’eau, ou la jouissance d’un paysage agréable, il n’y a pas de débouché pour ces services et personne n’est enclin à payer pour le maintien de ce bien.

(…) Il est difficile d’évaluer les implications des modifications d’écosystème et de les gérer de manière efficiente parce que beaucoup parmi les effets sont lents à se manifester, parce qu’ils peuvent se produire principalement à des distances des lieux de modifications, et parce que les plus coûts et avantages de ces modifications profitent à différents groupes de parties prenantes.

(…) Par exemple, le phosphore s’accumule en grandes quantités dans beaucoup de sols agricoles, menaçant fleuves, lacs, et océans dans les zones côtières, avec une eutrophisation [4] accrue. Mais des années ou des décennies peuvent s’écouler avant que le plein impact du phosphore ne se manifeste de manière visible à travers l’érosion et d’autres processus. (…)

Résumé

Trois problèmes majeurs liés à notre mode de gestion des écosystèmes de la planète causent déjà un sérieux préjudice à certaines personnes, en particulier les pauvres, et à moins de les résoudre, ces problèmes engendreront une baisse substantielle des bénéfices à long terme que nous procurent les écosystèmes :

▪ D’abord, environ 60% des services d’origine écosystémique sont en cours de dégradation ou d’exploitation de manière non rationnelle, dont l’eau douce, la pêche intensive, la purification de l’air et de l’eau, la régulation du climat aux échelles régionales et locales, les risques de catastrophe naturelle, et les parasites.

▪ En second lieu, il est scientifiquement établi, même si c’est de manière incomplète, que les changements provoqués au niveau des écosystèmes augmentent la probabilité d’apparition de changements non-linéaires à ce niveau (dont des changements accélérés, brutaux, et potentiellement irréversibles), avec des conséquences importantes sur le bien-être de l’Homme. Les exemples de tels changements incluent l’apparition de maladies, la détérioration brutale de la qualité de l’eau, l’apparition de « zones mortes » dans les eaux côtières, l’effondrement de la pêche, et des perturbations au niveau du climat régional.

▪ Troisièmement, les effets néfastes de la dégradation des services d’origine écosystémique (la baisse persistante de la capacité d’un écosystème à procurer des services) sont subis de manière disproportionnées par les pauvres, et contribuent à l’aggravation d’une iniquité et de disparités croissantes entre les communautés et constitue parfois le facteur principal de la pauvreté et des conflits sociaux.

Il n’y a pas un simple remède à ces problèmes puisqu’ils résultent de l’interaction de plusieurs préoccupations bien connues, dont le changement climatique, la perte de biodiversité, et la dégradation des terres, chacune prise individuellement étant assez complexe pour connaître une solution approprié qui lui soit propre.

Un jeu efficace de répliques visant une gestion durable des écosystèmes exige des changements substantiels aux niveaux institutionnel et de la gouvernance, des politiques économiques et des mesures incitatives, des facteurs sociaux et de comportement, de la technologie, et de la connaissance.

N-B : Ce vaste rapport scientifique possédait une ampleur similaire à celle des rapports du GIEC (Groupe intergouvernemental d’étude du climat) . Mais il ne fut pas validé par les politiques, après sa publication en 2005. Et il est finalement resté quasi lettre morte…

Extraits du Rapport de synthèse de l’Évaluation des Écosystèmes pour le Millénaire

Millenium Ecosystems Assessment (en anglais)

Voir aussi : Millenium Ecosystems Assessment dans l’encyclopédie Wikipedia.

Notes

[1] Un biome est la plus grande unité de classification écologique qu’il est convenable de reconnaître en dessous de l’échelle mondiale, telle que les forêts de feuillus tempérées ou les prairies de montagne. Le biome est une catégorisation écologique largement utilisée, et du fait qu’une quantité considérable de données écologiques ont été produites et de travaux de modélisation entrepris sur la base de cette catégorisation, certaines informations dans le cadre de la présente évaluation ne peuvent être fournie que sur la base du biome.

[2] Taxonomie : science des lois de la classification des formes vivantes.

[3] Estimations de certitude : « très certain » (98% de probabilité ou plus), « haute certitude » (85 à 98% de probabilité), « certitude moyenne » (65 à 85% de probabilité), « basse certitude » (52 à 65% de probabilité), et "très incertain (50 à 52% de probabilité).

[4] L’eutrophisation désigne usuellement le déséquilibre qui résulte d’un apport excessif de nutriments.