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Publié : 14 février 2010
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L’urbanisme à la française

Échangeurs, lotissements, zones commerciales. Depuis cinquante ans, la ville dévore la campagne. Une fatalité ? Non : le résultat de choix politiques et économiques.

L’empire du hangar

http://barbietuerick.blogspace.fr

Deux hypermarchés en 1960, 115 en 1970, 407 en 1980, plus de 1 400 en 2010. La création de surface commerciale a atteint un nouveau record en 2009 (4 millions de mètres carrés, dont 80 % en périphérie) en totale contradiction avec le Grenelle de l’Environnement. (…)

En France, 70 % du chiffre d’affaires commercial est réalisé en périphérie des villes, contre 30 % en Allemagne. (…)

« C’est partout le même alignement de cubes et de parallélépipèdes en tôle ondulée, le même pullulement de pancartes et d’enseignes », se désole Jean-Pierre Sueur, sénateur socialiste du Loiret. (…)

Et pour quel bilan ! « En cassant les prix sur quelques rares mais symboliques produits, les grandes surfaces se sont enrichies en ruinant les pompes à essence, les commerces de bouche, les drogueries, les quincailleries, des milliers de commerces indépendants spécialisés ou de proximité, des milliers d’artisans, et même des milliers de producteurs et fournisseurs. Les résultats sont objectivement inacceptables. Avec, en plus, des prix supérieurs à ceux de nos voisins européens ! » Jean-Paul Charié, député UMP du Loiret, dans un rapport sur l’urbanisme commercial rédigé en mars 2009. (…)

Le rêve pavillonnaire

http://lesyeuxouverts.blog.lemonde.fr/category/picardie/

Sur les 437 000 logements mis en chantier en 2007 (record historique, le chiffre est retombé à 330 000 en 2009), plus de la moitié sont des maisons individuelles (construites sans architecte à 95 %). Moins de 10 000 maisons sont écologiques. (…)

À partir des années 80, les gouvernements, de droite ou de gauche, ont délégué à d’autres la fabrication de la ville. L’Etat s’est mis au service du privé : « Le meilleur exemple, c’est Laurent Fabius, qui « offre » à Eurodisney une ligne de RER que les habitants de Marne-la- Vallée réclamaient sans succès depuis des années ! »En 1983, les lois de décentralisation donnent tout pouvoir aux maires en matière de permis de construire « et la catastrophe commence, estime Thierry Paquot, philosophe de l’urbain et éditeur de la revue Urbanisme. La plupart des élus sont totalement incompétents en matière d’urbanisme, et de plus ont un goût exécrable ». Ils se reposent sur les promoteurs pour produire du clés en main. « L’habitat se banalise et conduit à cette France moche qui nie totalement l’esprit des lieux. » (…)

Voitures particulières

5 millions en 1960, 19 millions en 1980, 31 millions en 2010.
Trajet moyen de chaque Français pour se rendre à son travail : 15 kilomètres en 1975, 19 en 1999, 26 aujourd’hui.
Un cadre parcourt en moyenne 18 kilomètres, un ouvrier 40.

Autoroutes

174 kilomètres en 1960, 5 251 en 1980, près de 12 000 en 2010.
Le réseau est presque totalement privatisé.
Le produit des péages s’élève à plus de 7 milliards d’euros.

Ronds-points

La France importe le carrefour giratoire, dit « rond-point anglais », en 1984.
On en compte plus de 30 000 : la moitié du total mondial … et trois fois plus qu’au Royaume-Uni.

Sols urbanisés

Les surfaces agricoles ont diminué de 50 000 hectares par an dans les années 80, du double dans les années 90.
La moitié des sols urbanisés, proches des villes, constituaient les meilleures terres agricoles. (…)

Extraits de Xavier de JARCY et Vincent REMY, Comment la France est devenue moche, Télérama, N° 3135, du 13 au 19 Février 2010, p. 24, 2,30 €.